Aujourd’hui, encenser les espèces consacrées, c’est affirmer qu’au-delà des apparences, elles sont bien le Corps et le Sang du Seigneur. Dans l’antiquité, l’usage cultuel de l’encens était répandu. Certains peuples employaient cette résine, censée purifier (l’atmosphère, mais pas seulement) pour éloigner les démons, comme le mentionne l’historien grec Hérodote. Quant au peuple juif, il avait édifié un autel en bois d’acacia plaqué d’or, après que Dieu en avait fait la demande à Moïse, en précisant : « Aaron y fera fumer l’encens aromatique. C’est un encens perpétuel devant Yahvé ». À l’époque du Christ, les juifs continuaient d’employer l’encens dans les rituels du Temple. Pour preuve, l’évangile de Luc : le prêtre Zacharie, père du futur Jean Baptiste, y apparaît comme « désigné par le sort, selon l’usage liturgique, pour aller offrir l’encens dans le sanctuaire du Seigneur [tandis que] toute l’assemblée du peuple se tenait dehors en prière ».
Son adoption par les chrétiens se situe dans la continuité de cet antique usage.
Offrande et signe de la prière.
Produit par un arbre originaire du sud de la péninsule arabique, l’encens ou Oliban (nom utilisé en pharmacie) n’a pas de valeur en tant que tel. L’intérêt de cette résine, que l’on pile ou réduit en petits grains avant de la poser sur le charbon de l’encensoir, réside dans sa combustion. Ce que révèle clairement l’étymologie : encens vient d’incensum, qui signifie « ce qui est brûlé ». Cette combustion, qui consume l’encens jusqu’à le réduire en cendre, symbolise l’offrande que le Christ fait de lui-même à son Père. Une offrande à laquelle s’associe toute l’Église, notamment lors de la messe. Quant à la fumée qui s’en dégage en s’élevant vers le ciel, elle symbolise et accompagne la prière des fidèles qui monte vers Dieu. Ce qu’exprime ainsi le psalmiste : « Que monte ma prière en encens devant ta face ».
Son odeur, réputée agréable, symbolise « la bonne odeur du Christ » que sont en principe les chrétiens pour Dieu, comme saint Paul l’explique aux Corinthiens. Au-delà de sa valeur symbolique, l’usage de l’encens est un véritable signe : « En utilisant l’encens, l’Église signifie concrètement son adoration et sa prière » (Dom Robert Le Gall, Dictionnaire de liturgie). En s’adressant à deux de nos sens (la vue et l’odorat), il peut aider les êtres incarnés que nous sommes à pénétrer dans la profondeur des mystères de Dieu, notamment l’Eucharistie. Les rois mages ne nous ont-ils pas ouvert la voie ?
par Élisabeth de Baudoüin – famillechretienne.fr