Maria n°32
Deuxième jour dans le Cœur de Jésus
Mère du Verbe, la conversation avec Marie
Consécration de nos pensées et de nos paroles
La pensée du Père
Quand nous disons que Marie était depuis toujours dans la pensée du Père, nous ne voulons pas dire que Dieu pense à notre pensée. Nous avons des pensées alors que Dieu n’en a qu’une qui n’est qu’un seul acte en englobe toute connaissance et toute action, sa pensée est omnisciente, elle est en dehors du temps et contient le temps, elle est indissociable de son amour puisque Dieu est amour, de sa parole qui est aussi est une et unique ; on parle de la Parole de Dieu, de son Verbe qui est unique. Sa Parole est aussi action et son acte créateur est unique.
L’expérience de la mystique chrétienne tend à cette simplification qui ramène toutes les pensées captives dans la pensée de Dieu. Cette simplification est une unification de l’être dans l’union à Dieu.
Mais écoutons Saint Thomas d’Aquin : « Oui, le nom de « Verbe » dit rapport à la créature. En se nommant , Dieu connaît toute créature. Or, le verbe conçu dans la pensée représente tout ce que le sujet connaît en acte ;de fait, en nous, il y a autant de verbes que d’objets de pensées différents. Mais Dieu connaît en un seul acte soi-même et toutes choses ; son unique Verbe n’exprime donc pas seulement le Père, mais encore les créatures. D’autre part, tandis qu’à l’égard de Dieu, la pensée divine est connaissance pure, à l’égard des créatures elle est connaissance et cause ; ainsi, le Verbe de Dieu est pure expression du mystère du Père, mais il est expression et cause des créatures. D’où la parole du Psaume (Ps 33,9) : « Il a parlé, et les choses ont été faites. » Nommer « le Verbe », c’est en effet évoquer le plan opératoire des choses que Dieu fait. (Somme théologique, 1 683,21)
Le Davar
Ce que le docteur de l’Eglise exprime dans des catégories théologiques devrait nous être familier en tant que lecteur de la Bible amoureux de sa parole. Pour beaucoup le Verbe, le logos, est une révélation de la nouvelle alliance. C’est méconnaître le vocabulaire biblique. L’hébreu possède un mot dont le champs sémantique est une grande richesse et que le grec avec « logos » ne rend que partiellement, il s’agit de Davar.
Davar peut être traduit de trois manières différents : parole, événement, chose. Il va sans dire que choisir un de ces trois sens appauvrit considérablement le texte. Prenons deux exemples :
1) Dans Genèse 22,1, nous lisons : « Après ces choses, Dieu mit Abraham à l’épreuve, et lui dit, Abraham ! Et il répondit, me voici ! » Que signifie après ces choses ? Le traducteur aurait très bien pu dire : après ces évènements, après ses paroles. Notons également que « nisa » aurait très bien pu être traduit par tentation plutôt que mit à l’épreuve. Ceci nous aurait aidé dans la découverte du sens car Dieu ne tente pas l’homme, c’est le travail du diable. Le commentaire juif de ce texte dit qu’il faut comprendre « après ces paroles ». Et quelles sont ces paroles puisque le texte de la tentation d’Abraham n’est précédé d’aucun dialogue pas plus que de « choses » particulières, le chapitre précédent se termine sur une généralité. Les paroles en question sont celles qui, comme dans le livre de Job, ont été échangées entre Dieu et Satan pour mettre Abraham à l’épreuve.(Job 2,3) : « Le Seigneur dit à Satan, as-tu remarqué mon serviteur Job ? Il n’y a personne comme lui sur la terre ; c’est un homme intègre et droit, craignant Dieu, et se détournant du mal. Il demeure ferme dans son intégrité, et tu m’excites à le perdre sans motif. »
2) Nous lisons également dans l’évangile de Luc (2,19): « Marie gardait toutes ces choses, et les repassait dans son cœur. » « Choses » est une traduction bien vague. Nous pouvons comprendre selon ce qui précède qu’il s’agit des évènements qui viennent de se passer, la naissance de Jésus et tout ce qui l’entoure ainsi que les paroles des bergers qui rapportent l’annonciation des anges. On aurait donc pu traduire par : Marie gardait toutes ces paroles et tous ces évènements dans son cœur. Le mot grec rema signifie aussi bien discours que chose.
Le sens du verbe
Les civilisations traditionnelles possèdent un sens du verbe que nous avons perdu par l’inflation de la parole mais aussi par l’usage de l’écrit. Une parole donnée dans ces cultures, vaut tous les écrits du monde. C’est toujours vrai en Afrique et dans d’autres cultures. Le monde sémitique privilégie la parole à l’écrit. Alors que nous disons les paroles s’envolent, les écrits restent, les sémites reconnaissent un pouvoir au mot. Aussi subissons-nous l’effet de paroles imprudentes sans nous en rendre compte. Comme je le dis souvent : toute parole est en quête d’incarnation. Des parents qui sous l’effet de la colère ou de la déception prononce des paroles de condamnation sur leurs enfants ne savent pas le dégât qu’ils commettent. C’est une loi psychologique que de vouloir authentifier inconsciemment les paroles qui ont été prononcées sur nous auxquelles nous avons donné valeur de prédiction. Comme : tu ne feras jamais rien de bon, tu n’es qu’un imbécile etc. C’est pour cela que Jésus nous dit que celui qui traite son frère d’imbécile est passible de la géhenne. Dire du mal, c’est étymologiquement maudire comme une bénédiction c’est une diction du bien. Aussi les orientaux sont-ils très prudents dans leurs paroles. Jésus nous invite à ne pas dire de paroles imprudentes qui nous engagent par serment. Lors du Kippour le principal péché qui est remis est justement celui-là. En ce jour, Dieu efface toutes les paroles imprudentes, tous les serments, tous les vœux et les engagements pris verbalement et qui nous entravent.
Dans le monde antique quelqu’un à qui on avait extorqué une parole par la ruse devenait prisonnier de sa parole car elle était reconnue efficace. Que l’on se souvienne de ce mythe grec où un héros cherche à épouser une femme qui n’en veut pas. Il grave sur une pomme : je jure d’épouser untel et lance le fruit à la jeune fille qui déchiffre à haute voix le message sue la pomme et la voilà contrainte au mariage !
Aujourd’hui nous ne sommes plus des gens de parole car nous parlons trop. Trop de paroles tuent la parole et l’inflation engendre la dévaluation. Déjà les Pères parlaient de la jactance comme d’un grave péché nuisible à la vie spirituelle. Le jeûne de parole ne conduit pas à un silence stérile mais à une union au Verbe aussi Marie est-elle appelée dans l’hymne acathiste : parole silencieuse. Le silence de l’Esprit est une vibration vitale, une modulation du Verbe que recherchent ses amis dans la prière contemplative.
La garde des pensées prend alors une grande place car les pensées engendre un incessant discours intérieur qui empêchent l’émergence de la Parole. Les Pères du désert disaient : celui-là fait silence mais à l’intérieur c’est un bavardage incessant, un autre parle mais à l’intérieur il fait silence. Notre parole en effet doit se nourrir à cette source du silence où Dieu parle à notre cœur. Marie est si silencieuse dans les écritures mais comme lorsqu’elle parle comme dans le Magnificat elle exprime avec une rare intensité la pensée de Dieu.
La Mère du Verbe
Nous avons une séquence presque chronologique dans la signification du davar. Une parole est d’abord une pensée à laquelle on attribue un pouvoir créateur dès qu’elle est prononcée, la parole une fis émise devient une chose et un événement. La création du monde par le Verbe Divin s’inscrit dans cette séquence. Dans le texte hébreu de la genèse on « entend » la création comme un écho de la voix de Dieu par exemple, pour la lumière Il dit : « Yehi Or va Yehi Or » qu’il faudrait traduire par « Est lumière et lumière est ».
Nous pouvons interpréter le récit de l’Annonciation de cette manière-là. L’incarnation du Verbe est l’écho de la voix du Père par la bouche de l ‘Ange Gabriel sous l’action de l’Esprit dès que Marie acquiesce à ce que la Parole résonne en elle. La Vierge est parfaitement transparente à la Parole de Dieu, la clarté de son âme ne créé aucune distorsion pour que la volonté du Père soit faite en elle. Marie est pour nous une parole donnée. Elle est un milieu où nous pouvons accueillir la volonté créatrice de Dieu.
Il est intéressant de noter que tous les verbes employé pour la création sont dans un temps qui n’existe pas en français et que l’on appelle en hébreu l’inaccompli. L’inaccompli n’est pas un passé simple ni un passé composé c’est, pourrions nous dire, un imparfait qui se perfectionne dans le présent et dans le futur. La parole créatrice continue son œuvre et se perfectionne dans le présent et dans le futur. Aussi le rôle de la Mère du Verbe n’est-il pas terminé. La position protestante est que la La conversion avec Marie ne se situe pas seulement au niveau d’une relation d’amitié, d’amour où nous échangeons des paroles de tendresse, de confidences ou de consolation avec elle. D’elle nous recevons le Verve qui est créateur en nous.
Or Jésus nous a dit : « Prenez donc garde à la manière dont vous écoutez. » (Lc 8,18) Nous entendons tant de paroles, d’enseignements que nous retenons avec notre seule intelligence. La Vierge, elle, dans son Annonciation est toute écoute, tout accueil. Avec son fiat, elle ne met aucune barrière entre la Parole et son écho en elle, elle est le lieu de la création nouvelle. C’est donc la « manière dont nous écoutons. » On pourrait dire qu’elle est notre oreille spirituelle. Car Jésus dit « vous avez des oreilles et vous n’entendez pas. » La Loi Divine commence par l’écoute : « Ecoute Israël » La fille de Sion est toute écoute et la Loi s’incarne en elle.
Pendant la Messe nous devrions célébrer et acclamer ma Parole de Dieu avec tout notre être en entrant dans cette attitude de parfaite disponibilité pour qu’il nous soit fait « selon sa Parole ».
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